D’une restauration à l’autre : L’Impôt dû à César

« Rendez à César ce qui est à César ». Vous connaissez sûrement cette célèbre formule, mais savez-vous d’où elle vient ?

Ce tableau du XVIIIe siècle, intitulé L’Impôt dû à César et dont l’auteur est inconnu, illustre cette formule évangélique. Il dépeint le moment où le Christ déjoue le piège des pharisiens, venus lui demander s’il était permis selon lui de payer l’impôt à l’empereur. L’enjeu est de taille, car si le Christ l’interdit, il peut être dénoncé comme opposant ; à l’inverse, s’il l’autorise, il peut passer comme traître à son Dieu. Jésus brise le piège par la formule : « Rendez à César ce qui est à César, et à Dieu ce qui est à Dieu ».

Et ce tableau alors ?

Il s’agit d’une copie d’après une composition originale de Rubens, célèbre peintre flamand, exécutée vers 1614, qui se trouve au musée de San Francisco. De nombreuses autres copies existent et sont conservées dans différentes institutions et collections privées. Prenez par exemple ce tableau présenté dans l’église de Saint-Omer : la ressemblance est frappante !

Le tableau du musée d’art et d’histoire Paul Eluard de Saint-Denis appartenait à l’ancien Hôtel-Dieu de la ville (pour en savoir plus, cliquez ici). Placé dans le bureau de l’administrateur, il avait vocation à inciter le personnel à veiller à une bonne utilisation de l’argent. Ce tableau, qui fait aujourd’hui partie des collections de la ville de Saint-Denis, était jusque récemment présenté au sein du parcours permanent, dans les salles dédiées à cette ancienne institution.

 

Pourquoi l’œuvre n’est-elle plus exposée au musée ?

 

Son état de conservation ne permettait plus de le présenter aux visiteurs. Un constat effectué par le service des collections du musée a révélé que ce tableau avait connu une première restauration il y a bien longtemps (sans doute avant son entrée dans les collections du musée) et nécessitait de nouveaux traitements.

Les anciennes restaurations étaient très visibles : les photos montrent que d’anciens repeints, qui servaient à dissimuler des manques de peinture, étaient en très mauvais état, se craquelaient et s’écaillaient, laissant voir un mastic blanc par endroits (voir photo). Cette altération se propageait et risquait de révéler de grandes zones blanches.

Un repeint désigne une couche de peinture, appliquée après la réalisation du tableau, le plus souvent pour masquer un manque de matière. Il peut être plus ou moins étendu et surtout, plus ou moins réussi ! Une méthode pour repérer des repeints bien accordés est d’observer l’œuvre sous lumière UV. Le terme mastic désigne une préparation malléable, souvent blanche, qui durcit au séchage. Il sert à combler des manques de matière avant de retoucher, la couche de peinture étant souvent plus épaisse qu’on ne l’imagine.

 

Vue de deux repeints sur mastics blancs, dont une vue sous grossissement x70 © Nina Robin

Vue de deux repeints sur mastics blancs, dont une vue sous grossissement x70 © Nina Robin

D’autres retouches anciennes venaient perturber la composition, en particulier des repeints réalisés par-dessus le vernis qui protège la peinture.

Comment lui rendre son éclat ? – un travail de fourmi toujours en cours

Afin de traiter ce tableau pour le présenter à nouveau dans les meilleures conditions possibles, le musée a fait appel à une conservatrice-restauratrice de peintures habilitée à travailler sur les collections des musées de France. Elle a procédé à un examen complet du tableau sous différents éclairages (voir photo) pour faire un diagnostic et une proposition de traitements qui respecte l’œuvre et son histoire.

 

Photo de l'examen de repeints en lumière rasante (à g.) et sous lumière UV (à dte) © Nina Robin

Photo de l’examen de repeints en lumière rasante (à gauche) et sous lumière UV (à droite) © Nina Robin

 

Les traitements sont aujourd’hui en cours :

l’ancien vernis, devenu jaune avec le temps, a été allégé (voir photo) et les couleurs du tableau ont retrouvé leur éclat. Le plus gros du travail, qui concerne les repeints, aura lieu dans les prochaines semaines. Nous ne pouvons que vous encourager à venir découvrir ce tableau lorsqu’il aura retrouvé toute sa splendeur !

 

Allègement de l’ancien vernis jauni © Nina Robin

Allègement de l’ancien vernis jauni © Nina Robin

 

 

Le musée d’art et d’histoire Paul Eluard remercie vivement Nina Robin, conservatrice-restauratrice de peintures, pour son travail et pour les visuels transmis.

 

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