L’œuvre 17 octobre 1961 (2018-2020) Algérie algérienne ; Ici on noie les Algériens ; Service spécial, a été acquise par le Département de la Seine-Saint-Denis pour sa Collection départementale d’art contemporain en 2020.
Cette œuvre des Sœurs Chevalme est présentée pour la première fois du 14 au 18 octobre au musée d’art et d’histoire Paul Eluard de Saint-Denis à l’occasion de la commémoration du 17 octobre 1961.
Dans ce triptyque aux dimensions impressionnantes, les artistes reprennent les codes de la fresque historique pour rendre hommage aux victimes de la manifestation du 17 octobre 1961. Les dessins ont été réalisés à partir de fragments d’archives photographiques et filmographiques. Ils sont assemblés dans une composition qui se lit de gauche à droite offrant une chronologie de la nuit du drame, en apparence linéaire mais non exhaustive. C’est une composition synthétique qui construit un récit à partir de différentes images.
L’œuvre emprunte la technique du montage cinématographique en juxtaposant des images pour rendre perceptible, dans un temps et un espace limité, une réalité qui s’est déroulée en plusieurs lieux et pendant plusieurs heures. Le choix de la gravure sur bois donne une profondeur au dessin, une matérialité qui l’éloigne d’une représentation documentaire pour se rapprocher de l’esthétique d’un roman graphique géant, un grand format ouvert sur une histoire vivante.
La parole des artistes
« La fresque s’attache à raconter les événements de la nuit du 17 octobre 1961. Nous avons opté pour une lecture narrative de l’événement où les hommes et les femmes sont au cœur de la représentation. C’est un hommage à une action non violente qui a contribué à la future indépendance de l’Algérie vis-à-vis de l’occupant français. La fresque se lit dans une chronologie, en apparence linéaire, de gauche à droite, relatant cette nuit. Le principe formel retenu est la mise à plat spatiale et temporelle de l’événement. Plusieurs ellipses temporelles sont opérées. D’une part, les manifestations se sont déroulées en plusieurs endroits. D’autre part, les fortes répressions policières ont disloqué les cortèges. L’ensemble de la reconstitution dessinée a été faite à partir d’archives photographiques et filmographiques. Le point de vue adopté se veut objectif, même si les événements du 17 octobre 1961 sont encore sujets à des interprétations et des incertitudes. Nous avons opté pour des dessins très contrastés, sur un fond noir, rappelant cette nuit et son caractère dramatique. La scène est chargée de détails, mais ne raconte pas tout (évocation des rafles mais omission des internements). Entre la scène des manifestants et celle de la rafle, nous avons positionné une vue sur la Seine, avec un pont en arrière-plan. Quelques corps jetés du haut du pont sont visibles, mais il ne s’agit pas de focaliser le souvenir de la nuit sur son seul aspect macabre.» Delphine et Elodie Chevalme.
Les artistes
Delphine et Elodie Chevalme, nées en 1981 à Paris. Vivent et travaillent à Saint-Denis
L’œuvre artistique d’Élodie et Delphine Chevalme aborde les questions liées au fait colonial et à l’hybridation des cultures en conjuguant une grande diversité de techniques : dessin, photographie, installation. Sœurs jumelles, les deux artistes mènent un travail dont la thématique générale est l’identité multiple et complexe, fruit d’une Histoire qui se déplace, migre, s’enrichit en permanence. « C’est par la circulation, géographie et plastique que nos projets, depuis 2006, sont construits. De ces mouvements inhérents à notre pratique, nos œuvres sont devenues protéiformes. Plutôt que d’être des spécialistes d’une technique, nous sommes devenues «mobiles» déclarent-elles.
En 2021, elles participent à l’exposition Un.e air.e de famille au musée d’art et d’histoire Paul Eluard de Saint-Denis – commissariat Anne Yanover et Farah Clémentine Dramani – Issifou. L’exposition est présentée jusqu’au 8 novembre 2021, en partenariat avec le Département de la Seine-Saint-Denis dans le cadre de la Saison Africa2020.
Un.e Air.e de famille invite à penser l’art afro-diasporique depuis le musée d’art et d’histoire Paul Eluard de Saint-Denis. Elle révèle l’engagement anticolonial des surréalistes et autres artistes des collections du musée dont les œuvres entrent en dialogue avec les pratiques artistiques contemporaines de treize artistes femmes d’Afrique et de ses diasporas
La collection départementale d’art contemporain de Seine-Saint-Denis
La Collection départementale d’art contemporain a été créée en 1986 dans l’objectif de soutenir la création contemporaine et de la rendre accessible au plus grand nombre grâce à des dispositifs de médiation diversifiés. Riche de plus de 2500 œuvres et en évolution permanente, cette collection est ouverte à la diversité des formes de la création : peinture, sculpture, installation, photographie, vidéo. Elle est enrichie via des achats d’œuvres, des commandes photographiques, des commandes d’œuvres pour l’espace urbain.
La collection est consultable sur le site artsvisuels.seine-saint-denis.fr