Un jour, une œuvre : Pourtraict de la ville de Sainct Denis en France (François de Belleforest)

Sauriez-vous reconnaître la ville d’aujourd’hui dans cette représentation, la plus ancienne de Saint-Denis ?

Nous sommes en 1575, François de Belleforest (1530-1583), tour à tour historiographe du roi, poète et traducteur, livre alors un ouvrage reprenant et augmentant La cosmographie universelle de tout le monde de Sébastien Münster, parue quelques années plus tôt : de nombreuses places fortes de son temps y sont présentées, comme Londres, Rome, Jérusalem, le Caire, Mexico, etc., avec, pour chacune, une notice l’accompagnant. Dans le cas de Saint-Denis, l’auteur explique avoir eu l’aide de moines de l’abbaye, notamment celui en charge de la conservation des chartes (titres de propriété, de ventes, de privilèges octroyés). Il décrit une ville au lendemain des guerres de Religion, avec leurs impacts sur la population et le bâti dionysiens. Il complète par une description et une gravure de l’église abbatiale, soulignant sa fonction de nécropole royale.

On découvre une ville entourée de remparts, doublés par des fossés en eau, que cinq portes avec ponts levis permettent de traverser : le système défensif autorisé par le roi Charles V pour protéger la ville contre les Anglais, pendant la Guerre de Cent Ans. La muraille, dont la lente et coûteuse construction est décidée en 1356, persiste dans le paysage et marque une limite urbaine jusqu’au début du XIXe siècle. La porte au Sud sera facilement localisée par les Dionysiens d’aujourd’hui, il s’agit de la porte de Paris. On repère encore quelques éléments de voirie, toujours présents à ce jour : les équivalents des actuelles rues de la République, de la Boulangerie, place de la Résistance ou encore la partie Sud de la rue Gabriel Péri. L’empreinte du rempart, quant à lui, se lit à travers les larges boulevards Marcel Sembat, Jules Guesde, Carnot et Félix Faure.

Le tissu urbain est particulièrement dense dans l’hyper-centre. Ce secteur correspond au bourg du début du Moyen Age. Il était entouré d’un premier rempart de bois dont seules deux portes et la forme arrondie de certaines voies suggèrent encore l’existence.

Au-delà, les parcelles sont loties le long des voies, avec parfois de vastes jardins et lieux de cultures en fond de parcelle. Un marécage occupe encore la partie sud-est. Deux cours d’eau traversent la partie Est, le Croult et le rû de Montfort, approvisionnant les fossés défensifs et permettant le développement d’une activité artisanale intra-muros telle que le travail des peaux ou la teinturerie.
Les archives municipales de Saint-Denis conservent également un exemplaire de ce document. Celui des collections du musée a la particularité d’avoir été colorié. Cette mise en couleurs est sans doute ancienne, elle pointe des éléments monumentaux de la ville, notamment les églises, l’abbaye et la basilique. Cet édifice se distingue des toits de tuiles de l’habitat environnant par son revêtement bleuté, évoquant sa couverture de plomb.

Ce « pourtraict de la ville » est un précieux élément documentaire, notamment pour les archéologues de l’Unité d’archéologie de la ville quand ils préparent leurs chantiers. Il trouve sa traduction en maquette, au sein de la première salle d’archéologie du musée. Réalisée au 1/ 1000ème par Michel Vallat, elle a nécessité de « relever » la vue en perspective donnée par le plan, en s’appuyant sur des plans cadastraux anciens. Cette mise en forme est le fruit du travail de deux architectes, Pascal Hersän et Serge Klibaner.

 

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