Le Pain du Siège de Paris (1870 -1871)

« L’aspect n’en est pas plus appétissant que le goût, c’est horrible à manger » : le pain du Siège de Paris (1870-1871).

Les collections du musée d’art et d’histoire Paul Eluard sont très variées : tableaux, dessins, sculptures, gravures… mais saviez-vous que le musée conserve aussi de la nourriture vieille de presque cent-cinquante ans ? Du pain, plus précisément !

En 1870, la France est en guerre contre la Prusse et une coalition d’Etats allemands. La défaite est cuisante côté français et, en septembre, Paris est encerclée. Commence alors un long siège pour les Parisiens, qui débouchera sur la proclamation de la Commune de Paris en mars 1871.

Pendant cette période difficile, l’alimentation est une question centrale. Comment nourrir les milliers d’habitants de la ville alors que l’approvisionnement est très compliqué, pour ne pas dire impossible ?

Des mesures d’urgence sont prises !

Le pain, pilier des repas français, devient très vite une denrée rare dont il faut contrôler la production et la distribution.

Son prix est d’abord fixé par la ville (on parle de « taxe du pain »). Il est ensuite rationné : 300 grammes par jour sont accordés à chaque personne, 50 grammes pour les enfants. La farine des particuliers, lorsqu’elle dépasse cinq kilos, est réquisitionnée. Les boulangeries ne doivent servir que leurs habitués ou les personnes qui peuvent prouver qu’elles habitent le quartier.

Et quand ça ne suffit pas…

Malgré ces mesures, la farine de blé vient à manquer. Il faut alors trouver de nouvelles recettes, la composition et l’aspect du pain (ou plutôt des pains) changent. Les descriptions par les témoins de l’époque sont peu appétissantes : certains sont « gris bleuâtres » et comparés à de la cendre diluée dans de l’eau, d’autres sont jaune terreux ou gris… Leur seul point commun est d’être très mauvais ! Zola le décrit ainsi dans son livre La Débâcle : « Depuis que le blé manquait, le pain, fait de riz et d’avoine, était un pain noir, visqueux, d’une digestion difficile » (Emile Zola, La Débâcle, 1892. Edition Le Livre de poche, p.574).

Si vous voulez tout de même imaginer le goût de ce pain de siège, sachez que différentes recettes sont parvenues jusqu’à nous, grâce à des chroniques ou des mémoires de Parisiens de l’époque. Voici un exemple :

« Une livre de ce pain renferme : un huitième de farine commune de blé, 4 huitièmes d’un mélange de fécule de pomme de terre, de riz, de lentille, de pois cassés, de vesces, d’avoine et de seigle moulus dans des proportions anormales ; 2 huitièmes d’eau, 1 huitième de paille et détritus d’enveloppes de grains de légumes. » (Paradis, Jacques-Henri, Journal du siège, par un bourgeois de Paris, 1872, p.769, à consulter sur Gallica)

Du pain dans un musée ?

Si mauvais que soit ce pain, il a quand même une qualité indéniable : il se conserve très bien ! Preuve s’il en est, le musée en possède différents morceaux, certains dans une boîte, d’autres collés sur des cartes souvenir ou dans des tableaux reliquaires comme celui intitulé « La Vitrine de l’année terrible » de Nicolas Kohl, à découvrir dans nos salles consacrées à la Commune de Paris.

 

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